Le domaine
Une famille, une histoire, une passion, un terroir. La lumière, l’eau, le feu, la terre. Tout se construit, s’enchevêtre, s’emmêle, se lie et se déroule au fil du temps. C’est l’histoire de notre vie, de notre métier et de notre domaine.
La famille
Aux archives départementales d’Avignon, est conservé un « censier ». Ce registre date de 1344 et il nous donne la liste de tous ceux qui doivent un impôt au seigneur du lieu, l’évêque d’Avignon. Y figurent déjà cinq ARMANI. Ils se prénomment Pierre, Raymond, Bernard, Isnard, et Durant. Le nom d’ARMANI évoluera au fil du temps en ARMANIE, puis ARMANIER et enfin en ARMENIER. On retrouve ces différentes orthographes dans les archives communales ou familiales.
Sans être certains de rien on peut cependant estimer que ces 5 familles d’ARMENIER installées en 1344 à Châteauneuf et y possédant quelques biens étaient là depuis déjà longtemps…On peut alors rêver et se dire que les ARMENIER étaient là à la création du village… ! Pourquoi pas ! En tout cas il est sûr que nous faisons partie des plus vieilles familles du village.
Et il en va de même du coté maternel, notre mère, Jacqueline COULON était, elle aussi, issue d’une vieille lignée de Châteauneuf, les JOUFFRON, dont le plus vieux document en notre possession, un contrat de mariage, date du 4 novembre 1691. Ainsi, de génération en génération, notre domaine s’est fait et défait au gré des mariages et des successions …
En 1995, à une époque où la place des femmes dans une exploitation viticole n’était pas évidente, Sophie et Catherine Armenier prennent la tête du domaine de Marcoux. Catherine s’occupant plus de la vigne et Sophie de la vinification. Les deux sœurs s’investissent à fond dans le domaine et dans la qualité de leurs vins. En 2014, Vincent Estevenin, le fils de Sophie, prend sa place à coté de sa mère et de sa tante. Il amène sa jeunesse, sa passion et ses compétences au service de l’exploitation. En 2019 Catherine aspire à un peu plus de calme…elle prend sa retraite !
Le domaine de Marcoux
Le métier de viticulteur est un éternel recommencement et pourtant rien n’est jamais pareil. Les saisons se succèdent les unes aux autres et pourtant aucun millésime n’est entièrement pareil au précédent. C’est ce qui fait la richesse de notre travail, c’est ce qui fait que l’on aime notre métier.
L’hiver peut être très froid et fortement venté, rendant le travail de la taille beaucoup plus pénible. Il peut être pluvieux et la taille s’étire en longueur…mais pas de problème car la taille de mars est toujours la meilleure… !
Au printemps, passé le souci des gelées, on peut alterner chaleurs ou averses qui rendent, à tour de rôle, les sols plus ou moins ouverts au travail de la charrue ou à l’action de la « bouse de corne. » Soleil et pluie peuvent aussi jouer sur nos nerfs et nous faire craindre mildiou ou oïdium. On s’active alors pour préparer nos médecines et nos tisanes d’ortie, de camomille, pissenlit…
L’été arrive avec sa chaleur, parfois un mistral asséchant qui nous oblige à aller arroser nos petits plants. La chaleur nous fait commencer très tôt le matin et nous fait mettre à l’abri, en milieu de journée, quand elle devient « écrasante ». Et en fin d’été arrivent souvent les orages, comme ils sont dans le sud, violents et parfois destructeurs, mais souvent bienfaisants quand ils donnent un dernier coup de pouce aux raisins et les gonflent de jus.
Et puis viennent les vendanges, temps béni, dernier effort avant la cuve. Tout le monde est « sur le pont », on commence tôt, on finit tard mais ce n’est que du bonheur. Après viennent les fermentations, les remontages, les analyses, les dégustations. On bichonne on surveille, on écoute chanter nos cuves. Et on découvre enfin ce que sera le millésime, la somme d’une alchimie de mille choses, maitrisées ou non, instinctives ou calculées, innées ou apprises, jamais identiques. Et il ne reste plus qu’à faire partager notre plaisir et notre vin et à attendre que ça recommence… !!!
La culture en bio
Une autre histoire a commencé à s’écrire pour le domaine en 1991 celle de l’agriculture biologique. Depuis cette date nous sommes sous contrôle ECOCERT, notre certification porte sur l’agriculture biologique mais nous faisons le maximum pour appliquer les préparations biodynamiques (bouse de corne, silice, compost de bouse, tisanes…). Un choix judicieux qui, année après année, permet à nos vins d’exprimer toute la richesse d’un terroir d’exception.
L’histoire d’un village
C’est au XIème siècle qu’apparaissent les premiers écrits attestant de l’existence de notre village, Chateauneuf, bien sur pas encore « du Pape », mais Castrum novum, le terme « castrum » au moyen-âge signifiant village fortifié et non pas « château », qui, lui, se disait « castellum ». Ce nom évoluera un peu plus tard en « castrum novum calcernarium » : Chateauneuf Calcernier. Pourquoi ce nom ? Parce que sur le plateau calcaire, à l’est du village, s’installent de nombreux fours à chaux. Ces cailloux calcaires, réduits en poudre, donnent de la chaux, un matériau indispensable pour les nombreuses constructions qui se développent tout autour d’Avignon. En latin/provençal la chaux se dit « calx » et « cernere » signifie tamiser, notre village était donc « Chateauneuf de la chaux tamisée… » ! Rapidement, à cause de la présence du château des papes, le village deviendra « Chateauneuf Calcernier dit de Pape », et officiellement, en 1893, Chateauneuf-du-Pape.
Une particularité historique : une enclave dans le Comtat Venaissin
Au XIIIème siècle, Chateauneuf- du- Pape devient propriété de l’évêque d’Avignon bien que situé à l’intérieur du Comtat Venaissin, propriété de l’église romaine.
Ainsi, pendant des siècles, Chateauneuf-du-Pape a bénéficié d’un statut particulier : la justice, la fiscalité, la police, l’économie étaient dirigées par l’évêque d’Avignon. Le village était « dans le Comtat sans être du Comtat ». L’évêque seigneur du village, oui, mais les habitants de Chateauneuf-du-Pape, dés 1303 obtiennent la permission d’élire 3 magistrats-consuls chargés de gérer le village. Des consuls qui, à partir de 1688, sont élus à bulletin secret et qui peuvent même être élus sans avoir été candidats… ! C’est ainsi qu’en 1681 l’évêque oblige Guillaume ARMENIER à accepter sa charge de consul sous peine d’une amende de « 25 marcs d’argent »… !
Le rôle du 1er consul est très important, il est responsable de la sécurité, de la santé, il recueille les requêtes et les doléances des habitants et, pendant un temps, il est même responsable sur ses propres deniers des dépenses engagées par la commune… ! On comprend pourquoi ce Guillaume ARMENIER, qui avait déjà été élu 1er consul en 1677, n’avait peut-être pas envie de renouveler l’expérience !
Une situation qui dure jusqu’à la révolution française. Durant l’été 1790, l’assemblée des chefs de famille choisit d’unir leur village d’abord avec la ville d’Avignon puis ensuite avec la France. Une décision qui sera acceptée par l’Assemblée Nationale en septembre 1791. Nous ne sommes donc français que depuis 230 ans… !
La présence des Papes
En ce début de XIVème siècle les Papes fuient Rome ravagée par la guerre. Ils trouvent refuge dans le Comtat Venaissin et s’installent à Avignon pour 80 ans. A cette époque Chateauneuf- du- Pape est un gros village agricole : 2000 habitants en 1344, autant qu’en 2010.
La culture de la vigne est déjà importante mais que peut-on faire d’autre sur nos cailloux ?… Parmi les autres ressources la chaux, l’argile et, provenant de la Méditerranée, le sel qui transite par un port franc installé au bord du Rhône, quartier des ARMENIER… !
Les Papes construisent beaucoup autour d’Avignon, c’est Jean XXII qui, en 1317, commence la construction du château. Certains Papes, comme Clément VII y séjournent régulièrement. Un château qui en plus d’avoir une vocation défensive est aussi un lieu de villégiature et une protection surtout quand la peste ravage la région et cela arriva souvent au cours des siècles. (En septembre 1721, à Chateauneuf-du-Pape, la première victime de la grande peste est Bartholomée ARMENIER).
Après le départ des Papes les évêques ont du mal à entretenir ce grand bâtiment. Arrivent les guerres de religion, protestants et catholiques se le dispute, en 1563 il est incendié en partie.
A la Révolution les habitants de Chateauneuf-du-Pape, s’associent pour le racheter. Il sert de carrière de pierre et l’on peut voir, en se promenant dans le village, au détour d’une rue, sur la façade d’une maison quelques belles pierres provenant du château. Seul l’imposant donjon était resté intact mais en août 1944 les troupes allemandes, en se retirant, le font exploser.
Aujourd’hui ne reste du donjon qu’une façade théâtrale et, dessous, les anciens celliers qui accueillent diverses fêtes et cérémonies comme celles de l’Echansonnerie des Papes.